Le feuilleton du dimanche
Une quête infernale
Shi May Mouty
neuvième épisode
Razibuth dirigeait toujours le vaisseau spatial dans l’immensité monotone du cosmos. Le trajet de retour avait été amorcé, suite à la visite de la planète rouge.
Il somnolait à son poste de commande quand soudain, sur ses écrans, se dessina la silhouette d’une petite planète. Peu après, l’atterrissage s’y fit en douceur et le sas s’ouvrit sur de l’air pur. Le démon s’immobilisa émerveillé. Au dessus de lui, d’un horizon à l’autre se dessinait dans le ciel un gigantesque arc-en-ciel. Il était si vaste qu’il n’arrivait pas à en appréhender toutes les nuances. Il baignait dans un kaléidoscope fantasmagorique sous l’infini du ciel bleu.
Un soleil, dans une course accélérée, en éclairait tour à tour toutes les vibrations. Il projetait vers le sol un rouge profond, puis un orange sanguin s’acidifiant de jaune citron, qui finissait par se fondre dans un vert végétal, lequel virait au bleu marin et enfin s’abîmait dans les sombres profondeurs de l’indigo et du violet.
Le sol éblouissait de milliers de fleurs, une verdure resplendissante, du frais cresson bleu, des ombelles d’un blanc éclatant, des calices d’or…
Les roches elles aussi participaient à cette féerie, juxtaposant la craie blanche, les calcaires ocre, les grès roses, les ardoises vertes et violettes et les schistes lie de vin.
Razibuth, habitué à l’obscurité des cavernes infernales, ne cessait de cligner des yeux, ébahi par une telle débauche de couleurs.
Soudain surgit devant lui un homme jeune à la silhouette élancée, l’allure hardie, le regard conquérant. Ses cheveux s’agitaient dans le souffle du vent, il avançait les mains dans les poches, une pipe à la bouche. Il se dégageait de lui un petit quelque chose de sauvage et farouche, indomptable, insaisissable… une expression s’imposa à l’esprit de Razibuth : « un homme aux semelles de vent ».
L’homme lui parla alors : « Je suis Arthur, je marche, je rêve, je respire les couleurs, je les écoute et les transpose en mots, en sons et en images. Et toi, qui es-tu ? Qui es-tu, toi qui as pénétré dans ma tête et vu mes pensées ? »
Razibuth ne comprenait plus rien, son crâne semblait bouillonner, son sang vrombissait dans ses oreilles. Sa peau virait de teinte, écumant les rouges les plus violents et les noirs maléfiques. Il était pris d’une incompréhensible fureur, et se retrouvait incapable de répondre à cet étranger.
Il sursauta et s’éveilla.
« Arthur ? »
Reprenant pied dans la réalité, il soupira. Quel rêve étrange ! Un peu hagard, il se pencha vers ses écrans de contrôle pour poursuivre la surveillance.
Mais ceci est une autre histoire…
à suivre...