Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Fanes de carottes
24 mars 2010

Règlement de compte à Bone City - 1

West Telegraph, 4 avril 1879

Hier dans Main Street, aux alentours de midi, un brutal règlement de comptes a ensanglanté Bone City. Un homme qui s'était enregistré à l'Hôtel des Voyageurs sous le nom de Jack Thornhill a été tué par Bloody Jim Chester, le chef présumé de la bande de voleurs de bétail qui écume notre région depuis plusieurs mois. Durant la matinée, Jack Thornhill s'était enquis de la présence de Bloody Jim auprès des habitants, prétextant qu'il le cherchait « pour affaires »: « Vous savez dans quel bouge cette ordure de Bloody Jim cuve son tord-boyaux ? »

Quand il finit par le retrouver, alors que Chester sortait du saloon de Paddy O'Keefe, il tira sur lui à deux reprises, le blessant à la jambe et à l'épaule. Mais Bloody Jim, que nous connaissons comme la meilleure gâchette de Bone City, fut assez rapide pour répliquer et l'envoyer rejoindre ses ancêtres d'une balle en pleine tête. Puis il sauta sur son cheval et quitta la ville sans se retourner. La victime est un homme d'une vingtaine d'années, bond, assez grand. Il avait sur lui la somme de 300 dollars, une photo d'une jeune femme signée « Augusta » et son colt portait les initiales A.D.

Qui était le mystérieux étranger ? Quel compte avait-il à régler avec Bloody Jim Chester, de douteuse réputation ?

Le mystère reste entier.

De notre correspondant local à Bone City


Paddy O'Keeffe, nous rapporte sa version des faits :

On peut pas dire que je sois un ami de Bloody Jim Chester.

Mais je le connais un peu. Ça fait un bail qu’il vient dans mon saloon et que je lui sers à boire. Forcément puisque le meilleur whisky de Bone City se boit chez Paddy O’Keefe. Et il a une sacrée descente ! S’il ne tirait pas aussi vite, on l’aurait surnommé Jim l’éponge depuis longtemps !

Il passe avec sa bande quand il est dans le coin.

Voleurs ? Attention, j’colporte pas les ragots, moi. Avec tout ce que j’entends, si j’savais pas tenir ma langue, ça fait longtemps que j’aurais fini entre quatre planches. Et puis si c’était vraiment le chef de la bande de voleurs de bétail, vous croyez pas que le sheriff l’aurait coffré ? Non, pour moi, Bloody Jim Chester, c’est un client honnête et respectable. Un bon client même, il règle sa note, et c’est jamais le dernier pour payer sa tournée. Le reste, j’veux pas le savoir. Paddy O’Keefe est pas une balance.
Mais ce matin-là, c’est vrai que je l’ai trouvé bizarre.
Faut dire que tous les gars au comptoir parlaient de ce type qui traînait en ville et qui le cherchait. Ça causait, ça s’énervait et surtout ça buvait. On ne parlait que du macchabée. Enfin, à ce moment-là, il était pas encore mort, il posait des question partout dans la ville.

Faut pas parler aux étrangers, ça fait toujours des histoires.
Bref, il était pas comme d’habitude quand il est entré dans le saloon. Tout le monde a arrêté de causer. Même Johny la grande gueule. Bloody Jim regardait partout et ses mains ne quittaient pas son ceinturon, comme s’il voulait être prêt à dégainer vite fait. Les gars de sa bande étaient pas avec lui, ou alors ils étaient planqués quelque part. Mais il risquait pas de trouver ce type chez moi. Un pieds plats qui traite mon saloon de bouge, et mon whisky de tord boyaux est pas le bienvenu chez Paddy O'Keefe.
Bloody Jim s’est approché du bar. On n’entendait plus que le bruit de tintement de ses éperons qui résonnaient dans le silence. Cling, cling, cling. Il a enlevé d’une main son stetson pour le poser sur le zinc, l’autre restant toujours à hauteur de hanche et il a juste dit :
« Comme d’habitude Paddy »
Pas de bonjour, pas de clin d’œil. C’est pas sa façon de faire.
J’lui ai servi son verre. Il l’a descendu cul sec. Personne n’osait l’ouvrir. On aurait entendu une mouche voler, mais y a pas de mouche chez moi. Le saloon de Paddy O’Keefe est le meilleur saloon de Bone City.
C’est là qu’il a éclaté de rire. Il nous a tous regardés et il a éclaté de rire. Y a eu comme un blanc puis Nutsy Billy a ri lui aussi. J’pense pas qu’il ait compris pourquoi, il ne comprend plus grand-chose depuis qu’il s’est pris un coup de sabot dans la tête, mais du coup, tout le monde a fait pareil. Et Bloody Jim m’a dit :
« - C’est quoi ces têtes d’enterrement ? Sers-nous à boire Paddy, c’est ma tournée ! »
J’en ai servi des rasades, ce matin-là. Comme s‘il n’était pas sûr de pouvoir continuer à en boire. P’tête qu’il se disait qu’en Enfer, y aurait pas du si bon whisky que chez Paddy O’Keefe. En tout cas, l’atmosphère s’est bien détendue et quand le pianiste s’est amené pour jouer, tout le monde rigolait bien.
Bloody Jimmy gardait toujours une main sur le ceinturon, et je le voyais qui guettait la porte. Je crois qu’il savait qui était ce Jack Thornhill. Il l’attendait.

A un moment, un des types de sa bande est entré pour lui faire un signe. Ils surveillaient l’étranger pour leur patron. Il leur a dit de s’en aller, il voulait régler ça d’homme à homme. Il m’a demandé un dernier verre « pour la route » et il a payé. J’dois dire que je préférais comme ça. Les clients morts règlent pas leur ardoise. Si Bloody Jim Chester est le tireur le plus rapide que j’aie jamais vu, la meilleure gâchette finit un jour par trouver plus fort qu’elle.
Il est sorti et tout le monde s’est à nouveau tu. Sauf le pianiste. Du coup, on a pas entendu le tintement des éperons. Mais les coups de feu, si : Pan, pan, pan. J’me suis planqué derrière le bar et les clients sous les tables. On a entendu des bruits de cavalcade et des hennissements de chevaux, puis plus rien. Au bout d’un moment, ça a recommencé à bouger dehors, ça gueulait :
« Il est mort ! »
« C’est Bloody Jim Chester ! »
J’étais pas tranquille. Je n’aime pas quand mes clients meurent, surtout les bons. Et oui, Paddy O’Keefe est un grand sentimental ! Alors je suis sorti voir.

Le soleil tapait fort, j’ai dû m’habituer à la lumière. Il y avait des tâches de sang sur les planches de bois devant le saloon et dans la rue le corps d’un grand type blond, avec un trou en pleine tête.
Voilà ce qui arrive quand on traite le whisky de Paddy O’Keefe de tord-boyaux !

***
Une histoire de l'Ouest en réponse à un appel tout aussi à l'ouest.

Publicité
Publicité
Commentaires
O
Eh bien il avait la gâchette (ou le whisky...) susceptible ton cow-boy.... ;-)<br /> Orignal et pas facile de répondre à la consigne donnée. Tu as drôlement bien rendu l'atmosphère d'un saloon. On les voit comme ça dans les westerns et en te lisant j'étais à deux pas de ton héros, accoudée au bar juste à côté de l'endroit où il a posé son Stetson... ;-)
V
Ooopsss... Je me répète...<br /> Désolée.<br /> Sourire<br /> Vanina
V
Avec ta fin... je reste sur ma faim!!!<br /> C'est à peine une mise en bouche ce texte-là!... OKi avec un petit whisky, mais qd même...<br /> Une sympathique Ouest'mosphère....<br /> Sourire<br /> Vanina
V
Avec ta fin... je reste sur ma faim!!!<br /> C'est à peine une mise en bouche ce texte-là!... OKi avec un petit whisky, mais qd même...<br /> Une sympathique Ouest'mosphère....<br /> Sourire<br /> Vanina
Fanes de carottes
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
Publicité