Le feuilleton du dimanche
Une quête infernale
Shi May Mouty
cinquième épisode
(juste avant...)
Le vaisseau démoniaque filait
maintenant dans l’espace. Il se déplaçait à une vitesse supérieure à celle de
la lumière car les diables n’avaient rien à faire des lois de la physique. A
son bord, tous les démons étaient à leur poste, concentrés. Ils n’avaient pas
peur, ils ignoraient la maladie et les blessures physiques, mais la pression
psychologique était énorme.
Les fonctions de commandement
avaient, forcément, échu à Razibuth, le plus haut gradé à bord. Horreur !
Il surveillait toutes les opérations et ruminait de sombres pensées. Il fallait
trouver rapidement une planète de pêcheurs confirmés et repeupler l’Enfer pour
rentrer au plus vite et faire cesser cette musique lancinante. Malheur !
Il mourait d’impatience d’atteindre la première planète qu’ils devaient
explorer.
En attendant, sa première
décision fut de désigner un démon bricoleur pour tenter de localiser et de
neutraliser l’appareil qui diffusait ces rengaines exaspérantes.
Le vaisseau frôla une petite
planète sur laquelle poussait un rosier très agressif aux longues épines. Il
défendait la seule rose qui y avait éclos, incroyablement belle avec ses
pétales pourpre.
Quelques instants plus tard, ils
dépassèrent un tout petit astéroïde que les détecteurs ne repérèrent pas. Ils
ne virent donc pas le réverbère éteint au pied duquel dormait un petit être
tout habillé de jaune, une longue canne à coté de lui. Cependant, le passage du
vaisseau accéléra imperceptiblement sa vitesse de rotation.
Enfin leurs instruments
repérèrent une planète toute bleue dans un système lointain et ils se
dirigèrent dans cette direction. Qui dit bleue, dit eau. Qui dit eau, dit vie.
Tous les espoirs étaient donc permis.
Le vaisseau réussit son approche
et se posa sans difficultés. Mais aussitôt, il se mit à osciller comme s’il
était saoul, quelque chose n’allait pas. Une analyse de l’atmosphère, révélant
sa pauvreté en oxygène, incita les diables à enfiler leurs scaphandres. Puis
ils ouvrirent le sas pour constater que le vaisseau tanguait sur de l’eau comme
un vulgaire canard en plastique dans une baignoire. Devant eux s’étendait à
perte de vue un immense territoire complètement gelé… sauf sous le vaisseau où
la chaleur avait fait fondre la glace.
Mais au moins dehors, il n’y
avait plus de musique. Ca valait le coup d’y rester le plus longtemps possible,
à repérer les environs.
Cependant les diables claquaient
des dents, ils avaient horreur du froid. Ils ne connaissaient que la chaleur
infernale et n’avaient pas prévu d’emporter des bottes fourrées et des
doudounes. Razibuth souffrait terriblement et ne tarda pas à avoir des envies
de trouver un responsable à son malheur. Comme le diable chargé de l’intendance
avait lui aussi eu la joie d’être désigné volontaire pour le voyage, Razibuth
l’avait sous la main. Il put donc assouvir sa soif de torture, tant mise à mal
depuis qu’il n’y avait plus de damnés en enfer. Repérant le scaphandre qui
l’intéressait, il bloqua la vanne contrôlant l’arrivée d’air, et commença à
insulter le diable. Tandis que celui-ci commençait à étouffer, Razibuth le
renvoya à bord du vaisseau et lui ordonna de se placer sous un haut parleur
jusqu’à nouvel ordre.
Puis, Razibuth, un peu réchauffé
après cette montée de colère, s’intéressa à nouveau à la planète. Où étaient
les habitants ? Pas un pingouin, pas un ours blanc à l’horizon. Encore
moins de créature potentiellement pécheresse. Razibuth, qui était un peu faible
en géographie, valida la suggestion d’un diablotin d’aller vers le Sud.
« Il y fait probablement plus chaud » avait-il ajouté – ce qui avait
convaincu tout le monde.
C’est ainsi que commença
l’exploration de la première planète, rythmée par l’exaspérant flonflon qui
n’avait pas encore pu être maîtrisé. Pendant des jours, ils survolèrent à
vitesse supra-lente la surface de l’astre, ne rencontrant personne. Toujours et
encore, ce n’était que grandes étendues blanches, sans relief. La monotonie à
l’état pur. Enfin, ils aperçurent un être vivant.
Mais ceci est une autre histoire…
à suivre...