Terreurs et horreurs - 5
Chambre 13
Pandora
première partie
Elle
a accepté cette mission en intérim pour la Toussaint. Deux jours rémunérés
grassement qui aideront à payer cette télé qui leur fait de l’œil depuis
quelque temps déjà. Son ami n’a certes pas été ravi à l’idée de passer le week-end
seul, mais c’est le prix à payer quand on fantasme sur les infirmières. D’autant
que lui aussi a envie d’un grand écran
pour regarder ses matchs.
Le centre de cure est situé en montagne, à près d’une heure de route, et on
lui a proposé de dormir sur place pour lui éviter un trajet inutile sur des chemins
peu praticables. A son arrivée, un collègue la conduit dans la chambre où elle
passera la nuit, pour qu’elle y dépose
ses affaires. Située au dernier étage
dans une aile désaffectée du bâtiment, c’est une ancienne chambre de malade,
toute simple, avec un petit lit au cadre métallique, une table, une chaise et
un lavabo, les douches étant à l’étage. Il n’y a ni télévision ni téléphone,
mais elle n’en aura pas besoin. Elle s’attarde un moment à la fenêtre qui donne
sur les montagnes et les forêts alentour ; la neige toute fraîche a
recouvert les arbres d’un fin manteau brillant. Une vue magnifique.
Elle a choisi l’intérim parce qu’elle déteste la routine et que chaque nouvelle
mission constitue une petite aventure. Mais c’est toujours avec un peu
d’appréhension qu’elle prend son poste, découvre l’équipe et se familiarise
avec ses méthodes de travail, essaye de s’intégrer pour que la journée passe du
mieux possible. Aujourd’hui, l’ambiance est bonne et l’équipe plutôt sympathique.
Les veilleuses de nuit prennent le relais à vingt et une heure et après de
rapides transmissions, chacun rentre chez soi, les autres habitants à proximité.
Elle regagne, seule cette fois, sa petite chambre en passant rapidement par
l’extérieur pour gagner le bâtiment voisin. La nuit est froide et la lune,
pleine en ce samedi soir, donne à la neige un reflet grisé. Son téléphone sonne
alors qu’elle est encore dehors, et elle prend l’appel en marchant.
- Ça va, tu t’en sors ?
- Oui, l’équipe est sympa, je rentre,
maintenant. J’ai une petite chambre rien que pour moi dans un grand bâtiment
vide.
- Tu
n’as pas peur que le grand méchant loup vienne te manger ?
Wououououou !!
- Arrête Max, tu n’es pas drôle.
Elle entre, mais la lumière ne fonctionne pas.
- Mince !
- Qu’est-ce qu’il y a ?
- La lumière ne marche pas. J’ai besoin du
téléphone pour m’éclairer, je te rappelle quand je serai dans la chambre,
d’accord ?
- D’accord, à tout de suite.
Elle raccroche et se guide dans les couloirs désormais sombres et déserts à
la lueur de son téléphone portable qu’elle tient devant elle comme une lampe de
poche. Avec la nuit, le bâtiment a changé d’aspect. Les recoins de porte se
transforment en abris possibles pour meurtrier en mal de victime, les bruits
auxquels elle n’aurait pas prêté attention en journée prennent un sens
totalement différent, et la cruche superstitieuse qui sommeille en elle
remplace l’infirmière rationnelle qu’elle est habituellement. Elle n’aurait pas
dû raccrocher, le trajet aurait était moins effrayant avec Max au bout du fil. Elle
arrive enfin au grand escalier qui la conduira à sa chambre et entame la montée.
Un claquement de porte plus bas déclenche une peur panique qui la fait courir sur
les deux derniers étages et arriver, le cœur battant et complètement essoufflée,
à la porte de sa chambre. Là encore les ombres semblent héberger d’obscurs
personnages. Elle est redevenue la petite fille qui avait peur du noir. Elle
cherche la clé dans sa poche d’une main tremblante et l’engage laborieusement
dans la serrure. Il lui semble entendre un bruit de respiration derrière elle,
mais la porte s’ouvre enfin et elle s’engouffre à l’intérieur en refermant à
double tour le plus rapidement qu’elle le peut. La pièce sent la lavande. Elle
déteste cette odeur. Ça ne sentait pourtant pas la lavande tout à l’heure. Elle
sursaute en entendant un bruit sourd de l’autre coté. Elle aimerait croire que
c’est son imagination. Il faut que ce soit son imagination.
Un nouveau bruit sourd… Elle se plaque le dos contre la porte en espérant
ainsi empêcher toute intrusion, mais ses cinquante kilos ne feront pas le
poids.
- Il y a quelqu’un ?
Pas de réponse, bien sûr. Elle se sent ridicule mais elle est quasiment
sûre d’avoir entendu quelque chose.
- Hé, il y a quelqu’un ? Répondez, ce
n’est pas drôle !
Toujours rien.
Elle prend son téléphone portable pour appeler Max. Oui, tant pis si elle a
l’air ridicule. Tant pis s’il n’y a personne. Tant mieux même, pourvu que ce ne
soit rien. Elle ne pourra pas dormir dans ces conditions, à guetter le moindre
bruit, il faut qu’il la rassure.
Un grattement contre la porte la fait sursauter et la conforte dans ses certitudes : il y a quelqu’un derrière la porte. Ses mains tremblent tellement qu’elle doit s’y reprendre à plusieurs fois pour composer le numéro de son ami. Rester calme et respirer. Max, Max, réponds, dépêche.
à suivre...
*****
En réponse à l'appel "Terreurs et horreurs"