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Fanes de carottes
21 mai 2008

Taupe et monte-en-l'air - 2

Une Taupe qui vole !

Jean-Lin Fatty

A LA RENCONTRE DE L’ANIMAL…

Au tout début du mois d’avril 2007, je me trouvais au ponant de l’étang de Bairon (Commune de Le Chesne, Département des Ardennes, Région Champagne-Ardenne, France, Union européenne, Terre, Système solaire), en un lieu dont je n’ai pas encore pu déterminer les coordonnées. Celui-ci est repéré sur le terrain par une pierre blanche.

La température de l’eau de surface de cette étendue liquide peu profonde et presque stagnante fut estimée à 10°C (283,15 K).

La détermination de la température de l’air, relevée à 1,03 mètre à la verticale du dioptre [1] air eau donna une valeur approchée de l’ordre de 11,512°C.

La turbulence des gaz atmosphériques était très faible. A signaler : une légère convection thermique verticale ascendante, habituelle pour la saison et l’heure.

Equipé d’une paire de jumelles à prisme de Porro, le plan d’eau restait désespérément vide depuis plus d’une heure…

Caractéristiques des instruments d’observation :

Ø Optique traitée multicouches antireflet,

Ø Grossissement : sept fois,

Ø Diamètres des objectifs : cinquante millimètres,

Ø Coefficient de luminosité : cinquante et un,

Ø Pupille de sortie : 7,1 millimètres,

Ø Champ à un kilomètre : 124 mètres,

Ø Corps caoutchouté,

QUI NAGE…

Note au lecteur : afin de faciliter la compréhension des événements décrits ci-après, le présent narratif sera maintenant employé.

Soudain, vers 12 heures 45 minutes 21 secondes et 1/10 ème (T.U.C.[2]), à une distance évaluée à 52,26 mètres, j’identifie un objet nageant (objet nageant identifié : O.N.I.). Une Taupe femelle (Talpa europaea L.), âgée de deux ans, se propulse au milieu du milieu aqueux, la tête en avant, la queue en arrière, par rapport à son vecteur directionnel. La somme des forces extérieures appliquées au mobile étant nulle, le module de son vecteur accélération est nul et la norme de la vitesse est constante.

De nombreux auteurs ayant décrit en détail la nage de la Taupe, je renvoie le lecteur à la bibliographie de 321 pages qui complète cet article. Je ne peux que confirmer les observations des naturalistes cités.

Un Grèbe huppé (Podiceps cristatus), de passage au-dessus de l’étendue dulçaquatique stagnante continentale, n’amorce même pas un décrochement pour s’approcher de la nageuse qui parcourt sans difficulté apparente 18,335 mètres dans ma direction.

Remarque : points de référence pour les mesures des distances citées : 

Ø Pour la Taupe, les visées ont été effectuées avec pour point de repère le centre géométrique du point aveugle de son œil droit. Ce choix s’est avéré malencontreux lorsque la Taupe a cessé de nous regarder.

Ø Pour l’observateur, le point de référence choisi fut le barycentre du triangle formé par l’épiphyse, le chiasma optique et le trou de Magendie de son propre névraxe. La détermination précise de ce point demande que la tête de l’observateur soit calée dans un dispositif W.Z. K de dernière génération [3].

Toutes les mesures entre ces points ont été réalisées à l’aide d’une chaîne d’arpenteur en platine iridié, thermostatée à l’hélium liquide, maillons de 20 centimètres.

QUI S’ELEVE DANS L’AIR…

A 12 heures 49 minutes et 58 secondes (T.U.C.), une gerbe d’eau de trente centimètres de hauteur se forme autour de la Taupe. L’écran liquide me cache l’animal pendant une à deux secondes. Dans le moment même où l’écran liquide retombe sur le plan d’eau, je vois très distinctement le petit Mammifère insectivore s’élever dans l’atmosphère.

Paramètres du vol :

Ø Angle de montée : sensiblement 20° d’arc par rapport à l’horizontale.

Ø Vitesse linéaire : 30 kilomètres par heure (8,33 mètres par seconde de temps).

Ø Par rapport à cette nouvelle trajectoire, la position relative du plan antéro-postérieur du mangeur d’Insectes n’a pas été modifiée, si bien que dorénavant le corps de la bestiole présente son flanc droit au vent apparent. Dans la suite de la publication, cette position sera dénommée « vol latéral ».

Dans la nage, l’animal s’est toujours tenu en position de lordose (cf. schéma ci-dessous), l’appendice céphalique et l’extrémité caudale apparaissant surélevés par rapport à la zone médiane connective.

Dans le vol, l’animal adopte la position de cyphose (cf. schéma ci-dessous), les positions relatives des différents segments corporels étant inversées. Les pattes apparaissent pendantes.

A ce stade de la description des observations réalisées, arrêtons-nous un instant afin d’explorer quelques hypothèses :

1. Comment expliquer l’élévation de l’animal au-dessus de l’élément aqueux ?

Hypothèse : Dans l’eau l’animal est en position 1 

                        image1

 

 Dans l’air, l’animal est en position 2

 image2Cyphose (vol latéral)

 

Pour passer de 1 à 2, il suffit de provoquer une contraction coordonnée et simultanée des muscles abdominaux longitudinaux.

Si cette contraction est très rapide, les palettes des pattes peuvent prendre violemment appui sur l’eau et l’animal s’élève dans l’air (principe action-réaction).


Discussion : Les faits constatés vérifient cette explication.

Le professeur Myopis du laboratoire d’anatomie comparée des micromammifères de Blout m’affirme que la musculature abdominale de la Taupe possède les capacités de puissance et de vitesse qui permettent d’atteindre un tel effet.

Conclusion : Donc la brusque contraction simultanée et coordonnée des muscles abdominaux longitudinaux peut suffire à provoquer l’élévation de l’animal.

2. Comment expliquer que l’animal s’élève dans l’air selon une trajectoire perpendiculaire à sa trajectoire primitive ?

Hypothèse numéro 1 :

La Taupe est passive et subit un vent latéral qui la déporte en aval du lit du vent.

Discussion de l’hypothèse numéro 1 : Les mouvements atmosphériques mesurés et constatés sont trop faibles pour provoquer une dérive d’une telle ampleur. De plus, les transferts gazeux apparents observés sont verticaux.


Conclusion : L’hypothèse 1 est à rejeter.

Hypothèse numéro 2 :

La Taupe est active. L’appui des pattes sur l’eau s’exerce de manière dissymétrique. Il y a latéralisation. Dans le cas considéré, les pattes gauches sont plus efficientes que les pattes droites, ce qui provoque une projection du corps sur le côté droit, et non verticalement ou en avant.

Discussion de l’hypothèse numéro 2 : Cette hypothèse est plausible. Or l’observation, qui indique que la Taupe décrite est une « taupe vol à droite », induit une série de corollaires qu’il faudra vérifier.

Ø Existe-t-il des « taupes vol à gauche » ?

Ø Si les deux formes existent :

· quelle est la forme prédominante ?

· quel en est le ratio ?

· quelle est la forme ancestrale ? L’une des deux formes est-elle apparue antérieurement à l’autre ?

Ø Si oui, est-ce une adaptation innée ou acquise ?

Ø Si elle est innée, quel est le support génétique de cette variante phénotypique ?

Ø Si elle est acquise, quel(s) mécanisme(s) en gouverne(nt) l’apprentissage ?

Ø Quelles sont les modalités de cet apprentissage ?

Ø A quel(s) stade(s) du développement s’effectue cet apprentissage ?

Ø Etc.

Ø Quelles peuvent être les conséquences du « vol latéral » ?


En présentant un maître-couple important à la pénétration dans l’air, la traînée aérodynamique est très élevée et l’efficacité du vol s’en trouve fortement diminuée.


En restant dans sa direction de propagation initiale, la Taupe présenterait un maître-couple minimum d’où un coefficient Cx de pénétration dans l’air fortement amélioré. Pour le moins, la Taupe n'apparaît pas comme un voilier performant…. On peut même s’interroger fortement sur l’apport évolutif et adaptatif d’un tel comportement !

QUI RETOMBE…

Parvenu à une altitude de trois mètres, brusquement l’animal volant retombe comme une masse.


Les yeux rivés aux oculaires des jumelles, je peux admirer l’œil noir et glauque de la croqueuse d’Insectes. Ce regard et la motricité corporelle très désordonnée l’accompagnant me laisse à penser que l’aspirante aviatrice n’apprécie pas à sa juste valeur l’instant présent. Pourquoi ?


Au milieu de la course descendante de l’objet tombant identifié (O.T.I.), l’alarme de ma montre se déclenche. Ce signal impératif me remet en mémoire un rendez-vous non conditionnel chez mon ophtalmologiste. Dès le deuxième top, je cesse mes observations.


Je suppose que la course effrénée de l’insectivore s’est terminée dans l’eau mais je ne peux l’affirmer.

Quelques instants plus tard, une masse sombre furtive s’est intercalée entre mes yeux et le soleil. L’ombre projetée ne peut en aucun cas être attribuée à la Taupe. Ce phénomène est sans importance pour les faits relatés.

De retour sur les lieux le lendemain, je n’ai trouvé aucune trace tangible se rapportant au phénomène observé la veille.

Seul, dans le ciel, un rapace faisait le Saint-Esprit…


APPEL A TEMOINS :

Je n’ai encore jamais lu ou entendu la description d’un tel comportement. Je souhaite vraiment y voir plus clair. Si vous avez été témoin d’une telle scène, contactez-moi au plus vite.

Il serait très valorisant pour notre belle région que la Taupe de Bairon soit retenue comme référence internationale et soit ainsi élevée au rang de «Taupe-modèle ».


Professeur Talpa de l’Université de Myopus sur Vence – Ardennes.


[1] Surface séparant deux milieux transparents différents c’est-à-dire ici l’interface entre l’air et l’eau (la surface du lac).

[2] Temps Universel Coordonné

[3] Ce dispositif est uniquement disponible actuellement au World Brain Storming de Karlstadt am Maas (Institut Universel Français Mécanogalvanocycloplasmique).

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Commentaires
P
Je suis terrifié. <br /> Claude allègre aurait-il raison ?
P
Chères Fanes,<br /> <br /> Je lis assidûment votre blogzine, toujours si riche en informations scientifiques (mes étudiants travaillent depuis deux mois sur les moutons verts, avec hélas pour l'instant de moins bons résultats que les vôtres).<br /> <br /> J'ai été témoin du même phénomène que celui sus-cité, mais avec un éléphant, qui se prélassait dans un bain de boue avant de s'élever inexplicablement dans les airs. <br /> J'émis quant à moi l'hypothèse d'un enlèvement extra-terrestre, car je ne pense pas que ce pachyderme puisse provoquer une contraction coordonnée, simultanée et suffisante de ses muscles abdominaux longitudinaux.<br /> <br /> Je serai ravi d'échanger quelques observations de vive voix avec le Pr Talpa. Vous serait-il possible de nous mettre en relation?<br /> <br /> Bien à vous,<br /> <br /> Pr Lotario
M
Ah, un article scientifique comme on les aime ! Rien n'est laissé au hasard.<br /> Quelle patience cela a demandé pour observer "l'aspirante aviatrice". Merci Professeur Talpa des Ardennes !<br /> Une lectrice reconnaissante.
I
\o/ \o/
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