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Fanes de carottes
14 avril 2008

Le jeu du Robot - 3

John John rentre chez lui

InFolio

Clopin-clopant, chemin faisant, John John s’en retournait chez lui. N’ayant jamais osé approcher d’un cheval, c’était à pied qu’il se déplaçait. Et la cheville qu’il s’était foulée en s’enfuyant à la vue de l’ombre d’un chat le faisait horriblement souffrir.

Apercevant au loin un paysan venant en sens inverse, il regretta vivement d’avoir pensé prendre ce chemin.

Il se gratta le nez. Comme le prouvait l’épée qu’il portait, il était chevalier et se devait de présenter bien. Il rajusta donc dignement sa tunique, roussie par les flammes d’un dragon, alors qu’il fuyait d’une grotte où il avait souhaité passer la nuit.

Il entreprit alors de bifurquer vers le champ pour contourner l’homme à distance respectable, de peur de se faire attaquer. On n’est jamais trop prudent : derrière un paysan affamé peut se cacher un brigand prêt à vous dépouiller voire à vous tuer.

A cette pensée, son ventre se mit à ronchonner. Il s’était fait dépouiller 3 jours plus tôt pendant qu’il dormait. La bourse, déjà peu remplie, qu’il portait alors à la ceinture avait été tranchée. Une chance pour lui, le baluchon qu’il avait caché dans un arbre n’avait pas été trouvé, mais outre son nécessaire de toilette, il ne contenait qu’un vieux quignon de pain qu’il eut tôt fait d’avaler.

Ça faisait maintenant deux jours qu’il ne dormait plus. N’ayant plus un écot et n’arrivant pas à se résoudre à voler sa pitance, ça faisait également 2 jours qu’il se contentait de boire l’eau de quelques rivières et de cueillir des baies sur des arbustes. La vue de carottes débordant de la gibecière du paysan empira sa faim.

Il avait hâte de rentrer chez lui et retrouver son jardin où des légumes croissaient paisiblement. Pas d’animaux, c’eût été trop risqué de se faire mordre.

Il se gratta le nez, lissa sa moustache, regrettant qu’elle eut été raccourcie de manière dissymétrique la veille alors qu’il avait sursauté pendant qu’il se rasait. Un coq s’était mis à chanter, alors qu’il se croyait seul. Il n’avait pas remarqué de nuit la ferme qui se situait à côté du fossé qu’il avait choisi pour se reposer et faire sa toilette.

Rajustant son maigre baluchon, remontant la ceinture craquelée qui lui enserrait la taille et à laquelle pendouillait son épée, il regagna le chemin, non sans un dernier regard circonspect et affamé au paysan. Il se gratta à nouveau le nez.

Il savait qu’il lui restait encore deux villages à contourner avant d’atteindre sa cabane isolée. C’était toujours ça le plus compliqué quand il se déplaçait. Là où d’autres pouvaient traverser les villes en ligne droite, lui faisait toujours un détour bien large pour éviter les habitations. Et forcément quand il se présentait un fleuve que le pont du village aurait si facilement permis de traverser, il l’évitait et devait se débrouiller pour traverser autrement.

D’ailleurs, il y avait encore un fleuve à franchir et, à sa connaissance, aucun pont en rase campagne avant des lieues. Une fois de plus, il allait devoir se résoudre à couper un tronc d’arbre avec sa piteuse épée qui ne tranchait plus depuis bien longtemps, et s’en servir comme bouée pour traverser. Autant essayer d’en repérer un de suite, à l’écart du chemin.

Mais là où ça se compliquait, c’est que des vaches paissaient à coté du bosquet qu’il convoitait car il était situé près d’un gué. Il décida donc de contourner le pâturage pour accéder au bosquet par l’arrière.

Il quitta le chemin et traversa un roncier qui finit de déchirer le bas de son pantalon. Une chance qu’il ne fût pas en fleur ; il n’aurait pu supporter l’idée de s’approcher des insectes butineurs qui peuplent ce genre de végétation. Il se consola avec quelques mûres qui calmèrent un peu sa faim.

Longeant le pâturage, il arriva à l’arrière du bosquet. Il dégaina alors les 20 cm de sa lame émoussée et entreprit d’abattre un tronc d’arbre. Ça lui prit une bonne heure et sa lame s’en trouva d’autant plus cabossée.

Au prix d’un dernier effort, il souleva le tronçon qu’il venait de découper et l’amena au bord de l’eau. Le problème de ce gué, c’est que c’était la moitié d’un gué. Le fond ne se relevait que sur la moitié de la largeur du fleuve… la moitié située de l’autre côté du fleuve.

S’efforçant d’oublier qu’il y avait des poissons dans le fleuve, il avança dans l’eau en amont du gué. Mi-pataugeant, mi-pédalant, sa cotte de maille l’alourdissant, et s’accrochant au morceau de bois, il espérait atteindre la moitié de gué sans que le courant ne l’entraine trop loin.

Le baluchon glissa de dessus sa tête où il était posé pour éviter qu’il ne prenne l’eau. Il le rattrapa d’une main in-extrémis, commença à remettre le baluchon en place. Ce faisant, son nez se mit à le démanger. Sa seconde main lâcha le tronc d’arbre qui, recouvrant sa liberté brutalement, par un effet d’action-réaction, fusa à la surface de l’eau. John John se débattit alors dans l’eau comme un désespéré tandis que le courant l’entrainait.

Il fut sauvé quand ses jambes prirent contact avec le haut fond, là où le gué prenait naissance.

Mais quelque chose frôla à ce moment sa jambe : peut être une plante, plus probablement un poisson. Il recroquevilla ses jambes et perdit le contact avec le fond.

Quelques interminables minutes plus tard, il rejoignit la berge. C’est trempé et grelottant qu’il continua son chemin. Une idée ne quittait pas son esprit : sa mère pourtant connaissait ses répulsions, pourquoi l’avait-elle fait mander ? Et le fait qu’elle soit décédée avant même qu’il n’arrive n’arrangeait rien. Il avait fait tout ça pour rien. 

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Commentaires
I
@Papistache : en voilà une idée pour notre appel "culture des fanes de carottes" vous demandant de vous amuser autour des textes et illustrations déjà existantes !! ;)
T
Peuchère!.. Il me fait peine ce pauvre Johnjohn... ;-)
P
Ce qui me surprend, c'est que ce chevalier ait, un jour, accepté de quitter le ventre de sa mère.<br /> A moins que son éducation ne l'ait façonné tel que nous le découvrons (de loin)auquel cas, il serait intéressant de nous la dépeindre (son éducation, au jeune homme !).
M
Plus couard que ça ... on ne trouve pas !!!<br /> Le matin il doit se lever à "poltron-minet"... et encore ... y'a un minet !
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