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Fanes de carottes
12 décembre 2007

Parfums d'enfance et robots tueurs, par InFolio

Vestiges du Ravage

Slim, Glam et Shunt se serraient sur le sol froid de la maison, en rond devant l’âtre. Face à eux, pour compléter le demi-cercle, le grand-père était carré dans un antique fauteuil à bascule et s’adressait à eux :
- Alors, les pitiots, rapprochez-vous bien autour du feu. Ce soir, je vais vous raconter une histoire que m’avait racontée mon propre grand-père quand j’avais votre âge.
Shunt, le plus jeune, s’agita et murmura :
- Ça doit faire longtemps alors.
- Oui, et cette histoire date d’il y a encore plus longtemps. Au temps d’avant le Grand Ravage Energétique.
- Ohhh ! firent-ils tous en chœur.
- En ce temps là, il y avait des objets qui pouvaient se mouvoir tout seuls. Ce n’était pas de la magie, c’était grâce aux lectrices-IT ! Je vous ai déjà raconté, les lectrices-IT ?
- Oui, Pépy ! s’exclama Slim, le plus âgé, et aussi le plus vif. Et il débita: « Les lectrices-IT étaient fabriquées par des machines, et elles faisaient bouger d’autres machines. Pour que ces machines bougent, elles devaient être reliées à la grande toile de fils dans lesquels les lectrices étaient rangées ».
- C’est ça, oui. C’est ça, répondit le grand-père, et il devint pensif. Puis il reprit :
- Grâce aux lectrices, on pouvait s’éclairer, on pouvait se chauffer, on pouvait cuire la nourriture… ça remplaçait le feu que votre maman utilise pour vous faire à manger. On pouvait travailler aussi avec toutes ces machines qu’elles faisaient bouger…
Sa voix baissa alors : « Ça devait être bien… Et puis tout a disparu… »
Le silence se fit quelques instants, tandis que le grand-père repartait dans ses fantasmagories. Mais les enfants s’impatientèrent, et Glam s’exclama :
- Pépyyy ! Continue ton histoire !
Revenant à la réalité, il poursuivit :
- Ce que je ne vous ai pas raconté, c’est qu’il y avait des machines qui n’avaient pas besoin d’être raccordées par un fil à la toile !
Ils ouvrirent alors tous de grands yeux interrogateurs.
- Comment c’est possible ? dit alors Slim.
Ménageant son public, le grand-père se contenta de répondre :
- Ces machines-là avaient des piles !
- Des piles ? Comme des tas ? interrogea Slim.
- Des tas de cailloux ? renchérit Glam.
- Les lectrices-IT sont dans les cailloux ? Y’en a plein de cailloux ! Pourquoi y’en a plus de lectrices-IT ? interrogea naïvement Shunt.
- Y’a pas de lectrice dans les cailloux, y’a que de la pierre dans les cailloux. J’en ai déjà cassé un, répondit de nouveau Glam, cette fois avec une moue dubitative. 
- Non, non, ce n’est pas ça en effet. Mon grand-père lui-même n’a pas su expliquer pourquoi ça s’appelait comme ça. C’est un savoir qui est maintenant perdu. Ça désigne juste des petites boîtes dans lesquelles des lectrices-IT étaient enfermées.
Glam et Shunt, déçus, s’agitèrent un peu. Ils semblaient ne plus accorder grand crédit à ce grand-père qui s’enlisait lamentablement dans ses explications. Cependant, deux yeux continuaient à briller :
- Comment elles restaient dedans ? demanda Slim, insatiable curieux.
- Ah, ça… si je le savais… éluda le grand-père avant de poursuivre pour détourner la conversation :
- Et donc voilà, grâce à ces boîtes, il y avait des objets qui pouvaient bouger sans être accrochés à la toile. Tu pouvais les transporter partout, dans la forêt, dans les champs… Et même en restant chez toi, juste par ce que c’était plus facile sans fil.
Les trois enfants buvaient à nouveau ses paroles, les yeux toujours grand ouverts, essayant désespérément d’imaginer à quoi tout cela pouvait bien ressembler. Ils n’avaient rien vu des restes des anciennes cités. Suite au Grand Ravage, tout s’effondrait, et il était interdit de s’en approcher. Faute d’avoir été chauffées des canalisations avaient éclaté sous la pression des eaux gelées, affaiblissant les murs, déformant les chaussées. Les appareils permettant l’entretien complexe des bâtiments ne fonctionnaient plus, et ceux-ci tombaient en ruines. En moins d’un siècle, les villes avaient été désertées, la population s’était progressivement orientée vers la campagne, près des ressources vivrières.
Continuant son histoire, le grand-père s’agita sur son fauteuil.
- Et parmi toutes ces choses, il y en avait que vous n’imagineriez même pas.
Il glissa doucement la main dans son dos.
- Est-ce que ça vous plairait de voir un de ces objets ?
- Oui ! Oui ! Oui !
- Alors voilà quelque chose que m’avait montré mon grand-père quand j’étais enfant. Il me l’a même confié quelques années plus tard, tout comme je le confierai à l’un d’entre vous.
- A moi !?? Le cri fusa à l’unisson.
- On verra plus tard. Quand vous serez plus grands, et que vous saurez en prendre soin. Mais laissez-moi vous le montrer d’abord.
Il extirpa alors de derrière son dos un personnage délabré, haut comme deux mains. Il était totalement vêtu de noir. Une longue cape en tissu lui recouvrait le dos. Il portait un masque enserrant intégralement son crâne et son visage. Un bras pendouillait piteusement, ne tenant plus que par une tige métallique. L’autre portait une sorte de petit aiguillon vert. Les enfants le dévoraient des yeux.
- C’est un petit robot guerrier.
Il souleva la cape, enleva une pièce et poursuivit :
- Ici, dans son dos, sous la cape, une cavité avec deux emplacements cylindriques permettait de mettre les piles. Probablement qu’il devait être envoyé en mission loin, très loin pour se battre. Loin, où il ne pouvait pas être accroché à la toile, je ne sais pas… Regardez, là, dit-il en montrant l’aiguillon, il porte une épée. Mon grand-père avait appelé ça un sablazère. Quand le robot avait des lectrices dans ses boîtes, l’épée s’allumait et devenait tranchante, et le robot pouvait combattre.

* * * A suivre avec le jeu de la fin * * *

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Commentaires
I
@MAP : Vénération à ma relectrice qui a voulu que j'écrive autre chose qu' "électricité" pour être cohérente avec la déformation dans le temps de "sablazère". (vous saurez tout, vous saurez tout !)<br /> <br /> @Luma : j'en rougis. merci.
M
Super l'idée des Lectrices-IT ! Bravo !
L
J'adore cette histoire !
I
Merci pour les compliments, ça fait du bien de lire les gentillesses de nos visiteurs !
S
Merci, ça fait du bien de relire ces légendes des temps immémoriaux. On viendrait presque à croire que ces machines, ces fils, ces piles ont vraiment été utilisés à une époque lointaine.
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